Luiz Tadeo Damaschi, 49 ans, entrepreneur social prend en main la question des déchets de sa ville, Lavras au Brésil , alors que ce gigantesque pays connaît de graves problèmes en ce qui concerne l’assainissement de base et ne propose pas assez d’exonération fiscale des équipements et des matériaux recyclables...
Luiz Tadeo est consultant pour une ONG, la Fondation pour la Défense
de l’Environnement (FDPA, Fundação Pro
Defesa Ambiental), qui oeuvre depuis 15 ans dans les domaines
environnemental, social et culturel. Elle est située à Lavras,
une ville industrielle qui compte plus de 85 000 habitants,
dans l’état de Minas Gerais à 400 km
de Sao Paulo.
Un des projets phares de la FDPA est d’implanter
un programme de gestion intégrée des déchets
solides (PGIRS) dans la municipalité. La finalité du
programme est de gérer les déchets de toute
la ville de façon à avoir le moins d’impact
possible sur l’environnement.
Luiz porte entièrement ce programme, ce qui implique une variété d’actions. Il doit tout d’abord gérer l’ACAMAR, l’Association des Collecteurs de Matériaux Recyclables de Lavras. Fondée il y a 10 ans, elle compte 24 associés et assure la collecte sélective dans la municipalité, soit approximativement 40 tonnes par an et a déjà récupéré 3 000 tonnes de matériaux recyclables sur les 10 dernières années, ce qui veut dire économies des matières premières, de lumière et d’énergie. Au-delà de la collecte sélective, l’ACAMAR gère un programme de plantation urbaine, une scierie qui transforme et valorise les bois collectés dans les industries, ainsi qu’une fabrique de balais à partir de bouteilles.
Avant de s’attaquer aux déchets il plantait des arbres fruitier en plein cœur de Sao Paulo
De plus, Luiz essaie de développer le réseau
sanitaire de la ville en partenariat avec le Ministère
de l’environnement. Des stations de traitement des
effluents domestiques sont également en cours de développement
(avec une mise en service prévue pour novembre 2008).
Enfin la ville possède une entreprise de traitement
des déchets hospitaliers que la FDPA soutient.
Au-delà de la participation à ces projets
et programmes, Luiz est également Président
du Conseil Municipal pour la Défense et la Préservation
de l’ Environnement (CODEMA), un organe paritaire
et délibératif qui aide à assurer le
suivi des politiques publiques de la municipalité dans
le domaine de l’environnement.
Lorsque l’on demande à Luiz pourquoi il s’est autant investi dans la protection de l’environnement, il nous explique son parcours. « À la maison, nous avons toujours discuté des questions politiques et économiques. Je me suis engagé très tôt dans des actions du mouvement étudiant et syndical, mais je pensais qu’il y avait besoin d’une action concrète, de quelque chose qui puisse être mesuré, quantifié. J’ai donc lancé à São Paulo un projet de production de plants d’arbres fruitiers où les oiseaux aiment nicher ; 300 000 plants ont déjà été produits et distribués gratuitement à la population. C’est au travers de ce projet que j’ai obtenu l’appui d’Ashoka. J’ai ensuite fait la connaissance de la FDPA à Lavras dans le Minas Gerais en 1993 et j’ai été invité à participer aux projets qui étaient développés. C’est à cette époque que j’ai déménagé à Lavras, où j’habite depuis. »
Marié et père de 2 enfants, il était entrepreneur dans l’industrie du jouet et des articles de sport en bois. Il quitte tout pour s’investir dans ces projets auquel il croit, l’aide d’Ashoka ayant été décisive dans cette prise de décision. « Tous les projets que nous développons bénéficient de l’appui d’une ONG, d’une entreprise ou du gouvernement, mais l’aide d’Ashoka a été décisive pour que je m’implique complètement avec les ONG, essentiellement dans le domaine environnemental. ».
Luiz Tadeo Damaschi en bref
Métier
Consultant en solutions environnementales.
Spécificité
Après avoir lancé un programme de plantation d'arbres fruitiers en plein Sao Paulo, il veut supprimer les déchets du Brésil.
Pourquoi il est "Coeur Vert" ?.
.
Où la contacter ?
Son site.
P Ce soutient se comprend très bien quand on examine le bilan de la FDPA : en 10 ans, plus de 3 000 tonnes de matériaux recyclables ont été collecté. Elle a évité que 6 millions de mètres cubes de bois soient brûlés, en transformant ce bois en meubles pour les classes populaires et en caisses de légumes dans la scierie de l’ACAMAR. Grâce à son travail des politiques publiques ont été implantées : développement du remblai sanitaire, stations de traitement des égouts, mise en oeuvre de la collecte sélective, programme de réhabilitation des abords du périmètre urbain, collecte et traitement des déchets hospitaliers, programme de dépollution visuelle, programme de plantation urbaine, programme d’éducation à l’environnement…
Les éco-cassent-pied
Luiz est très fier de travailler certes pour protèger concrètement l’environnement mais aussi, et surtout, car il y a d’importantes retombées sociales. En effet l’action de la FDPA a toujours visé à améliorer la qualité de vie des personnes. Le projet que gère Luiz à l’ACAMAR a d’ailleurs pour principal objectif l’insertion des familles à bas revenus et marginalisées socialement, grâce à la vente de leurs déchets ménagers ! Les familles pauvres peuvent en effet trier et vendre leurs déchets ménagers au poids à cette société de recyclage.
Mais Luiz doit faire face au quotidien à d’importantes difficultés. Convaincre les hommes politiques d’appliquer des politiques publiques tournées vers l’environnement, et surtout il doit capter des ressources et pour cela vendre des produits fabriqués comme par exemple les balais à partir de bouteilles et des produits issus de la scierie. La production est de bonne qualité mais il est difficile d’écouler les stocks.
Heureusement la FDPA vient d’obtenir la donation d’une zone de 8 000 mètres dans la zone industrielle. « Nous avons encore besoin de capter des ressources pour développer ce nouveau centre de tri, afin de pouvoir mettre en œuvre la collecte sélective dans l’ensemble de la municipalité et générer davantage d’emplois et de revenus. Mais nous pensons qu’avec tous les enjeux environnementaux auxquels la planète doit faire face en ce moment, les gens seront plus susceptibles de participer et d’appuyer des activités liées à l’environnement et que les choses devraient désormais être plus simples. » Quel contraste avec la situation d’il y a quelques années : « on nous appelait ici au Brésil les « ecochatos » (« éco-cassent-pieds »), une dénomination péjorative car nous étions les seuls à venir « embêter » et à demander des comptes aux gouvernements et aux entreprises. Mais aujourd’hui, on voit les résultats… ».
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NdT : Ashoka (‘‘absence de souffrance’’ en sanskrit, www.ashoka.org) est un réseau mondial d’entrepreneurs sociaux qui favorise l’échange d’informations, la collaboration et la dissémination des projets. Il compte aujourd’hui plus de 1 600 entrepreneurs implantés dans différents pays. Au Brésil (www.ashoka.org.br), le réseau Ashoka regroupe plus de 250 entrepreneurs sociaux.
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